Voici le communiqué de presse de la HAS :
“Les femmes atteintes d’un cancer du sein infiltrant présentent, après l’ablation de la tumeur, un risque plus ou moins élevé de récidive contre lequel une chimiothérapie adjuvante peut être envisagée. Pour déterminer s’il est pertinent d’y recourir, l’équipe médicale dispose de critères clinico-pathologiques. Mais dans certaines situations d’incertitude thérapeutique – définies aujourd’hui par la HAS – l’utilisation des signatures génomiques pourrait constituer une aide complémentaire. La HAS, dans la continuité des travaux initiés par l’INCa, a évalué quatre signatures génomiques et considère qu’elles ne peuvent pas encore faire l’objet d’une prise en charge par la collectivité.
Chaque année, 55 000 nouveaux cas de cancers du sein sont recensés, présentant de multiples formes auxquelles les traitements doivent être adaptés : chirurgie, radiothérapie, chimiothérapie, hormonothérapie… Au-delà du traitement de la tumeur elle-même, l’enjeu est d’éviter les récidives. C’est l’objectif de la chimiothérapie adjuvante, qui peut être proposée à la patiente après une opération chirurgicale.
Or, la chimiothérapie est un traitement lourd présentant de nombreux effets secondaires. Il convient donc de n’y recourir que lorsque cela est nécessaire et utile au regard du risque de récidive. Aujourd’hui, la décision médicale, partagée avec la femme, repose notamment sur des critères clinico-pathologiques tels que son âge, l’existence d’un envahissement des ganglions de l’aisselle, la taille et la nature de la tumeur.
Pour les cancers du sein infiltrants, les signatures génomiques permettent d’estimer un risque de récidive à partir de l’expression d’un panel de gènes dans la tumeur. En complétant les critères clinico-pathologiques, et en particulier pour les patientes pour lesquelles ces critères ne lèvent pas toutes les incertitudes, elles pourraient être un outil d’amélioration de la décision thérapeutique.
C’est dans ce contexte que la HAS a évalué l’utilité clinique, par rapport aux critères déjà existants, des quatre signatures génomiques disponibles en France (Mammaprint®, Oncotype DX®, Endopredict® et Prosigna®). Celles-ci sont actuellement financées de manière dérogatoire via un dispositif ministériel : le référentiel des actes innovants hors nomenclature – RIHN.
La HAS identifie la population pour laquelle les signatures génomiques seraient utiles
Les critères clinico-pathologiques utilisés par les équipes soignantes suffisent aujourd’hui pour prendre la décision de mettre en place ou non une chimiothérapie adjuvante dans la très grande majorité des situations : ils identifient clairement les cancers à faible risque de récidive, pour lesquels la chimiothérapie adjuvante n’est pas utile, ainsi que les cancers à haut risque de récidive, pour lesquels elle est recommandée.
En France, la signature génomique ne présente donc un intérêt potentiel que chez les patientes à risque intermédiaire de récidive pour lesquelles il peut exister une incertitude décisionnelle chez les soignants. Pour la première fois, la HAS définit précisément la population concernée : les femmes dont la tumeur mesure entre 1 et 5 cm, est sensible à l’hormonothérapie adjuvante, de statut HER2 négatif, de grade 2 et sans envahissement ganglionnaire ou avec un micro-envahissement. Cela représenterait 5 à 10 % des femmes atteintes d’un cancer du sein infiltrant.
La HAS souligne que l’utilisation des signatures génomiques en dehors de la population d’intérêt définie pourrait engendrer deux risques :
- dissuader des patientes qui en auraient besoin de recourir à une chimiothérapie adjuvante, générant ainsi un risque supplémentaire de récidive voire de décès ;
- inversement, réaliser une chimiothérapie adjuvante non pertinente, exposant inutilement des patientes à des effets indésirables non-négligeables (surtraitement délétère).
En l’absence de données pertinentes, l’inscription au remboursement serait prématurée
Afin d’évaluer l’utilité clinique des signatures génomiques dans la population d’intérêt définie, la HAS a analysé les essais cliniques comparatifs existants dans le domaine. Or ces essais ne permettent pas de déterminer si, en contexte français, les signatures génomiques présentent une valeur ajoutée par rapport aux critères clinico-pathologiques existants. En effet, les études portent principalement sur des populations ne correspondant pas à la population d’intérêt.
Par ailleurs, les différentes études montrent que pour une femme sur cinq – voire une femme sur quatre – la décision de mettre en œuvre une chimiothérapie adjuvante diffère selon la signature utilisée.
Au regard de ce manque de données, la HAS attribue aux quatre signatures étudiées un service attendu insuffisant et donc – pour l’instant – un avis défavorable à un remboursement par l’Assurance maladie.
Collecter davantage de données pour identifier l’utilité clinique
Toutefois, la HAS reconnait l’intérêt potentiel des signatures génomiques comme outil complémentaire d’aide à la décision thérapeutique dans le contexte actuel de développement d’une médecine de précision. A ce titre, la HAS souligne qu’il est nécessaire de poursuivre la recherche clinique visant à valider l’utilité clinique des signatures génomiques au sein de la population d’intérêt en France.
Elle recommande, dans une logique de soutien à l’innovation, de maintenir le financement dérogatoire des signatures génomiques dans le cadre du RIHN. La HAS pose une condition sine qua non à cette prise en charge : la réalisation d’une étude clinique prospective, comparative, permettant de recueillir exhaustivement des données cliniques pertinentes et exploitables. Elle pourra revoir son avis en vue du remboursement lorsqu’elle disposera de ces données.”
Pour en savoir plus : Franceinfo:
Source : HAS